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Les Joyaux de la Couronne au Louvre

28 septembre 2020

Après dix mois de réaménagement muséographique de la galerie d’Apollon, le musée du Louvre rend hommage à la splendeur de la collection des Joyaux de la Couronne de France. Cette collection fut pendant plusieurs années éparpillée entre la galerie d’Apollon et le département des Objets d’Art du Musée du Louvre.

Sébastien Antoine, Couronne de pierreries du roi Louis XV, Château de Versailles

La galerie d’Apollon/ Lieu d’exception

Le choix de la galerie d’Apollon comme écrin pour le trésor des rois de France n’est pas anodin. Longue de soixante mètres avec ses 41 peintures, 118 sculptures et son décor exceptionnel élaboré aux fils des années par des artistes aussi illustre que Le Brun ou Eugène Delacroix.
Lieu de passage, puis lieu des majestueuses réceptions dès le règne de Louis XIV, elle fut transformée à partir de 1889 en salle d’exposition pour la collection des vases de pierres dures du Roi Soleil.

Vue d’ensemble du plafond de la galerie d’Apollon.

Cet emplacement mythique pour les joyaux les plus prestigieux du Royaume, symbole de l’identité monarchique est fortement lié au décor du lieu. La galerie est dès ses origines placée sous le signe de l’harmonie des arts dont Apollon est le gardien.

Une collection d’abord royale

Les Joyaux de la Couronne ou Diamants de la couronne sont composés de parures et de pierres non montées collectionnées depuis François 1er, enrichies par les monarques successifs et reconstituées sous le second Empire.
La collection initiale du Trésor avec le fameux spinelle dit « Côte de Bretagne »  remonte au règne de François Ier. Ce dernier rendit ces bijoux biens inaliénables appartenant à la couronne de France.

On connait l’attrait de Louis XIV pour les joyaux qui rehaussaient parfaitement ses tenues. L’écrin de Mazarin reçu par le roi soleil à son décès en 1661 lui permit d’asseoir encore un peu plus son statut et correspond à sa prise de pouvoir personnel.

Et c’est surtout avec les achats de plusieurs diamants d’exception – comme le Grand Sancy ou le Régent – grâce à l’intervention préalable de Jean Baptiste Tavernier aventurier ambassadeur et découvreur de trésors sous les règnes de Louis XIV que la collection des joyaux de la Couronne devint célèbre à travers le monde.
Pendant tout le XIXe siècle de nombreuses pièces royales ont servi à embellir les parures des impératrices Marie-Louise puis Eugénie.

Pour éblouir chaque parure le musée a mis l’accent sur une restauration complète des stucs et des boiseries et s’est évertué à mettre en place un éclairage optimal. Pari non aisé et parfaitement réussi !

Grâce à ces trois nouvelles vitrines placées au centre de la galerie. Nous pouvons aisément voyager à travers l’histoire des bijoux de la couronne et saisir leur évolution, leur usage, leur forme et leur tendance d’une époque à une autre.

Les trois ensembles de vitrines sont encadrés par les anciennes vitrines en bois dorés et sculptés renfermant les pierres dures de Louis XIV.
On retrouve un équilibre entre la grande préciosité des matières de gemmes et le travail de la parure sous l’Ancien Régime.

Ancienne vitrine comprenant les vases en pierres  dures du roi Louis XIV et de Charles IV d’Espagne offertes à Napoléon Ier

Coupe en sardonyx, Monture émaillée sertie de rubis et de diamants. Paris. Vers 1650

 

Passionné par les pierres précieuses depuis sa plus tendre enfance, le roi Louis XIV acquit de nombreuses pièces plus fabuleuses les unes que les autres.

Le Bleu de France

45,52 carats, taille brillant coussin antique, bleu-gris foncé (présence d’un grenage blanchâtre)

On pense d’emblée au fameux diamant bleu rebaptisé et retaillé en 1839 par le collectionneur et milliardaire Henry Philip Hope qui lui légua son patronyme.

Evalyn Walsh Mc Lean, grande héritière américaine acheta la pierre au joaillier Pierre Cartier en 1911. Elle la porte ici dans une monture en collier. Son destin assez tragique fit naître de nombreuses rumeurs de malédiction liée au diamant Hope

Découvert dans une mine indienne au XVIIe siècle, ce diamant pesait à l’origine 115 carats et fut acquis en 1650 par le négociant en pierres, Jean-Baptiste Tavernier.  Il le vendit au roi Louis XIV, la pierre est taillée en forme de rose, elle pèse alors 67,12 carats. Par la suite, le diamant est fut légué au roi Louis XVI, on retrouve alors le diamant monté richement en pendentif  au centre de l’ordre de la Toison d’Or.

Le pendentif de la Toison d’or du roi Louis XV, avec le fameux spinelle “Côte de Bretagne” en son centre et en dessus le Bleu de France ou diamant Hope

A la veille de la Révolution française, la reine Marie-Antoinette a coutume de le mettre en broche afin d’orner les corsages de ses somptueuses tenues. Après être passé de ventes aux enchères en ventes aux enchères, le diamant achève son épopée dans les mains du grand joaillier américain, Harry Winston. Ce dernier en fait don au Smithsonian Institute de Washington en 1958.
Son prix est aujourd’hui estimé à plus de 350 millions US$.

Le Sancy, le Régent et l’Hortensia

Face à ce diamant des plus purs doté d’une infinité de nuances, on peut également mentionner l’une des pièces maîtresses de l’exposition du musée du Louvre : le très grand Sancy du roi Louis XIV.

À gauche le Sancy, au centre le Régent et à droit le diamant rose dit « Hortensia » Nouvelle disposition de la vitrine centrale de la galerie d’Apollon

Acquis par le Louvre en 1976, son histoire remonte pour nous en 1477 lorsque Charles le Téméraire duc de Bourgogne l’acquiert. Après sa mort au siège de Nancy, le diamant de 55, 23 carats orne la bague de fiançailles de la fille du duc, Marie de Bourgogne.  C’est en 1570 en Turquie que l’ambassadeur de Constantinople, le seigneur de Sancy, Nicolas de Harley l’acheta et le loua pendant de nombreuses années à la Cour de France. Le cardinal Mazarin à l’écrin déjà très riche le racheta en 1657. A son décès en 1661, il le lègue à son filleul le roi Louis XIV. Le roi avait l’habitude de le porter en haut de ses chapeaux.
Son successeur, Louis XV, le fera monter pour orner sa splendide couronne de sacre en 1722 réalisée par son joaillier Augustin Duflos.

Couronne de Louis XV de 1722, le diamant dit le Régent orne la fleur de lys du devant, huit autres Mazarins les autres fleurs de lys du bandeau et le Sancy celle du sommet. Ces pierres furent remplacées plus tard par des répliques

Sous le règne de Louis XV la collection des Joyaux de la Couronne s’agrandit d’un diamant d’exception nommé le Régent. Originaire de la province de Golconde en Inde, il pèse à l’origine plus de 140 carats. Ce diamant est venu sertir le centre de couronne de sacre du jeune monarque composée de 282 diamants, 64 pierres fines et 200 perles, elle est encore considérée de nos jours comme la pièce royale la plus chargée.

La fin du XVIIe siècle et le début du XVIIIe siècle sont marqués par l’apparition de nouvelles techniques pour tailler les pierres. Quelques tailles aujourd’hui encore utilisées apparaissent : la taille en pointe,  en cœur, en pendeloque, à plusieurs facettes, en baguette ou encore la taille brillantée. L’usage est alors de coudre les pierres et de porter les bijoux en parure sur les costumes de cour.

Un net changement apparait avec le règne de Louis XVI. Le goût pour l’antique s’accorde à des ensembles plus discrets. Le style rocaille de Louis XV laisse peu à peu place à joaillerie tendant vers le naturalisme.

La Révolution et Napoléon

En 1792, nous sommes en période Révolutionnaire et se déroule un célèbre vol : celui du  Garde Meuble Royal. Avec ce triste événement disparait une grande partie du trésor des Joyaux de la Couronne de France. Des écrits (successoraux et lettres) mentionnent des reventes en sous-main à l’étranger notamment en Angleterre.
Ce n’est que sous le premier empire que la collection royale reprend forme progressivement.

Le trésor se regarnit avec les commandes des pièces incroyables faites par Napoléon au joaillier Marie-Etienne Nitot pour sa première épouse l’impératrice Joséphine. Après 1809, date du divorce de Napoléon et Joséphine, l’empereur fait remonter les parures d’Etat pour sa jeune et nouvelle épouse Marie-Louise de Habsbourg.

Joseph Franque. Portrait de Marie-Louise impératrice des français veillant sur le roi de Rome. Musée du Louvre

A l’occasion de son mariage l’impératrice Marie-Louise reçoit une somptueuse parure d’émeraudes comme il est d’usage à l’époque.

Le collier est composé de trente-deux émeraudes dont dix taillées en poire, délicatement entourées par 1138 diamants. Quant aux boucles d’oreilles, elles sont ornées de six émeraudes entourées par cent-huit diamants.

Les diadèmes

A l’origine, cette parure d’émeraudes comprenait un peigne, une boucle de ceinture et un diadème. Le diadème de Marie-Louise est l’un des rares bijoux historiques qui a subi un remaniement aussi important au cours des siècles.

Diadème de Marie-Louise

Le bijou était initialement incrusté de 79 émeraudes colombiennes d’un vert très profond pour un total de 700 carats.
A la chute de l’empire, Marie-Louise se retire en Autriche et à sa mort légua sa parure à sa tante l’archiduchesse Elise.
En 1950, le joaillier Van Cleef and Arpels racheta le diadème à l’un des descendants d’Elise et en démonta les émeraudes. Il vendit ensuite aux enchères pour un total de vente qui rassemblait une émeraude de 12 carats et 21 autres grosses émeraudes et 57 petites.
Van Cleef and Arpels remplaça les émeraudes par des cabochons de turquoises, un changement qui fut aussi apprécié que détesté.

Aujourd’hui le diadème de Marie-Louise appartient à la famille de la mondaine Marjorie Merriweather Post depuis les années 1971. Environ quatre années plus tard il fut donné à la Smithsonian Institution.

C’est ainsi,  le musée du Louvre a fait le nouveau choix de présenter la parure auprès des bijoux de la duchesse d’Angoulême dont son fameux diadème d’émeraude.

Diadème de la duchesse d’Angoulême (1778-1851), nièce de Louis XVIII, roi de France de 1814 à 1824.

La première partie du XIXe siècle dans l’art de la bijouterie est une période marquée par toutes les tendances de l’Ancien Régime avec les perles et les camées.
Les duchesses d’Angoulême et de Berry vont considérablement enrichir la collection des Joyaux de la Couronne sous le règne de Louis XVIII.

Portrait de la duchesse d’Angoulême

Portrait de la duchesse de Berry.

Les acquisitions faites sous la Restauration nous montre le goût pour les riches garnitures de diamants mais aussi pour les pierres de couleurs comme l’amétrine, la citrine, le quartz rose, la turquoise ou encor encore l’opale.

C’est l’âge d’or du bijou romantique !

 

Le Second Empire

A l’arrivé au pouvoir de Napoléon III en 1852, les Joyaux de la Couronne de France vont être à nouveau remontés par son épouse.
Le style des  parures du second empire sont plutôt classiques dans leur forme on oublie le côté florilège propre à Restauration et à la monarchie de Juillet.
Mais il y a aussi certaine fantaisie avec des inspirations grecques, et naturaliste avec des bouquets de fleurs, des guirlandes….

On connait l’admiration de l’impératrice Eugénie pour la reine Marie-Antoinette qu’elle cultive aussi bien dans le choix des couleurs et des parures.

Le style Eugénie est celui d’une splendeur toute Versaillaise !

Mll Pin, Portrait officiel de l’impératrice Eugénie, 1853.

Les parures de l’impératrice sont toutes rassemblées dans une unique vitrine entièrement dédiée aux bijoux du second empire.

Diadème de l’impératrice Eugénie, Paris 1853, 212 perles, 1998 diamants en argent et or.

Grande broche de corsage de l’impératrice Eugénie, Paris 1853.

A la suite de son mariage, l’empereur Napoléon III commanda au joaillier de la Cour, Lemonnier un ensemble de trois fabuleux bijoux, un diadème, une couronnette et une grande broche de corsage.

Ces bijoux sont constitués de délicates perles et de multiple diamants provenant en grande partie de la collection des Joyaux de la Couronne de France.

Il s’agit à l’origine de pierres précieuses provenant d’une ancienne parure de l’impératrice Marie-Louise puis retransformée par la suite par le joaillier Bapst pour la duchesse d’Angoulême en 1819.

En digne représentante de l’empire des Français, Eugénie va participer au rayonnement international de l’art de la joaillerie française devenant ainsi en cette seconde moitié de XIXe siècle une référence en matière d’élégance et de savoir-faire.

Grand nœud de corsage de l’impératrice Eugénie. Paris 1855 Argent et or + 2438 diamants brillantés et 196 roses

Couronne de haut de tête de l’impératrice Eugénie. Paris 1855 Or serti de 2490 diamants et 56 émeraudes

Ces deux pièces ont été créées par les joailliers : François Kramer pour le grand nœud de corsage et Lemonnier pour la Couronne de haut de tête.
Les commandes ont été passées par l’impératrice pour de l’exposition universelle de 1855.

On lui doit également la commande de nouveaux écrins confectionnés par le gainier Jean-Baptiste Nicolas Gouverneur.
Chacun de ces écrins est frappée des armoiries impériales.

Ancienne vitrine de la galerie d’Apollon. La vitrine présente désormais sept écrins des Joyaux de la Couronne de France

 

Le Louvre nous offre depuis janvier 2020 un merveilleux écrin pour les Bijoux de la Couronne. Grâce à une scénographie moderne et dynamique redécouvrons l’Histoire de France et celle de la Joaillerie. Plus d’informations sur le site du Louvre.

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